La procédure de conciliation a pour objet de permettre à une entreprise en difficulté économique ou financière de conclure avec ses principaux créanciers, avec l’aide d’un conciliateur désigné par le tribunal, un accord amiable destiné à mettre fin à ses difficultés. Cette procédure est ouverte à toute entreprise (sauf agricole) qui éprouve des difficultés avérées ou prévisibles et qui ne se trouve pas en état de cessation des paiements depuis plus de 45 jours. Elle est déclenchée à l’initiative du chef d’entreprise lui-même, qui saisit à cette fin le président du tribunal.

Gros avantage de la procédure de conciliation, elle est gouvernée par un principe de confidentialité. Ainsi, l’ouverture d’une telle procédure ne donne lieu à aucune publicité. Et toute personne appelée à la conciliation ou qui, par ses fonctions, en a connaissance, est tenue à la confidentialité.

Ainsi, en raison de cette confidentialité, une banque qui apprend qu’une entreprise fait l’objet d’une procédure de conciliation n’a pas à la déclarer en défaut à la Banque de France. C’est ce que les juges ont affirmé dans l’affaire récente suivante.

Une entreprise avait fait l’objet d’une procédure de conciliation à laquelle avaient participé ses principaux créanciers, notamment les crédits-bailleurs auprès desquels elle avait acheté des véhicules à crédit. Par la suite, la banque société-mère des crédits-bailleurs avait déclaré cette entreprise en défaut auprès de la Banque de France, laquelle avait dégradé le niveau de cotation de l’entreprise dans le fichier bancaire des entreprises (Fiben).

L’entreprise avait alors agi en référé contre la banque pour obtenir la mainlevée de l’inscription de défaut, faisant valoir que cette dernière ne pouvait lui reprocher aucun incident de paiement et invoquant le caractère confidentiel de l’ouverture de la procédure de conciliation.

Une information confidentielle pour tous

Les juges lui ont donné gain de cause. Ils ont d’abord rappelé que la confidentialité de la procédure de conciliation est opposable à toute personne qui, par ses fonctions, en a connaissance. Pour eux, cette confidentialité était donc opposable à la banque même si elle ne faisait pas partie des créanciers appelés à la procédure de conciliation.

Ensuite, les juges ont affirmé que l’ouverture d’une procédure de conciliation, qui n’est pas un signe d’absence probable de paiement d’une créance par l’entreprise qui en fait l’objet, est une information confidentielle qu’en l’occurrence la banque ne pouvait pas utiliser pour justifier une déclaration de défaut auprès de la Banque de France, peu importe que cette information lui avait été révélée par l’entreprise elle-même.

Les juges ont donc considéré qu’en ayant procédé à une telle déclaration de défaut, la banque avait causé à l’entreprise un trouble manifestement illicite qu’il convenait de faire cesser.

Cassation commerciale, 3 juillet 2024, n° 22-24068


©
Les Echos Publishing
2024